Lampedusa
C’est sans doute la symphonie des canons
Qui dans la fuite t’a poussé
Cette bataille que tu n’as pas demandée
Par des hommes contre la liberté
Femme adultère promptement lapidée,
Et ces petits voleurs aux mains coupées
Ton pays aurait il perdu la raison
Proie d’un fascisme qui porte un autre nom
Pour tes enfants tu n’voulais plus
Ni d’un d’état trop corrompu
Du cri des kalaches dans la rue
Ni la valse des machettes qui tuent
Construire ailleurs une autre vie
Les voir grandir loin des maudits
Ne pas se laisser massacrer
Sous l’apathie du monde entier
Tu as traversé la méditerranée
Lors d’une croisière improvisée
Pour la payer tu t’étais saigné
Les vautours opérateurs ont bien gagné
Naufrage probable ou te faire arrêter
Tu t’en es remis au destin
Les vagues la mer ou les douaniers
Personne t’a d’mandé si tu savais nager
La moitié de tes camarades
N’ont pu gravir la balustrade
Certains d’entre eux au fond de l’eau
T’ont dit Adieu dans un halo
Sur la plage tu as posé le pied
Pas cette fois pour nous libérer
Même qu’on ne t’attendait pas
Dans c’que tu crois « Eldorado »
Comme ceux d’avant tu t’es t’installé
Sans qu’on te donne les bons papiers
Pour ta survie, la clandestinité
Des tonne de jobs non déclarés
Des charognards vont en profiter
Tristes patrons sans moralité
Exigeant de toi les pires labeurs
Là où il y a danger dans l’effort et la sueur
L’Eldorado est un enfer
Bien loin du filon aurifère
Que tu t’imaginais en partant
Construire ce toit pour tes enfants
Le froid, la pluie et le ciel gris
Les insultes des abrutis
Ceux qui te toisent de travers
Et t’accusent des maux de la Terre
Tu ne sais pourquoi la machine à papiers
Un jour t’a donné une identité
Tu avais bien appris le français
Même s’il ne sonne toujours pas parfait
Pendant des années tu vas cotiser
Très honnêtement, tu auras travaillé
Mais on te verra toujours comme un étranger
Un gars dont il faut toujours se méfier
On t’fera sentir qu’t’es pas gaulois
Que tu dois respecter la loi
Tu s’ras souvent interpellé
Toi qu’on appelle le basané
Tu n’es ni d’ici ni de là-bas
Et pourtant des deux à la fois
De ta tête tu peux faire le Juda
Mais de ton cœur tu ne peux pas
A tout jamais déraciné
Tu as tout de même décidé de rester
En espérant pour tes enfants
Qu’ce sera différent quand ils seront grands
En espérant pour tes enfants
Qu’ce sera mieux quand tu seras vieux
En espérant pour tes enfants
En espérant pour tes enfants…